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Institut

Dans notre monde hyper-connecté, chaque sensibilité a sa voix, et tout contenu culturel est à chaque instant accessible en quelques clics. Si Gutenberg et son imprimerie révolutionnèrent à jamais la diffusion de la pensée et du travail littéraire, Internet surenchérit en ajoutant une série exponentielle d’explosions qui retentissent encore. Face à une multiplicité si diverse et si instantanée, quel espace reste-t-il pour les institutions ?

Celle de leurs survivances, peut-être. Depuis une décennie, certaines Universités investissent dans le numérique, sur la forme et parfois dans le fond, développant des modalités d’enseignement en ligne pour toucher un public étudiant plus large. Certains de ces cours se retrouvent dans les nouvelles Plateformes d’Apprentissage en Ligne (MOOC), où l’accès au savoir est particulièrement flexible et s’ouvre à un public beaucoup plus large. Mais leurs contenus sont encore trop souvent statiques et restent dans l’ensemble dépendent de l’autorité la plus classique de validation des savoirs culturels : le monde académique. Ces développements sont avant tout technologiques, et transvasent les modalités ancestrales de l’enseignement dans notre âge numérique. Les Universités Populaires répondent à une demande de programmes culturels rigoureux en dehors de toute logique de diplôme, mais elles reposent elles-aussi grandement sur des autorités académiques, et l’apprentissage se perpétue sur un paradigme vertical d’enseignement. Ces nouvelles formes de programmes éducatifs démultiplient la portée de la culture d’une manière organisée et rigoureuse. Cependant, elles restent à la surface de possibilités bien plus grandes, en sous-estimant le revirement radical déjà enclenché par notre époque, où les idées et l’écrit sont désormais animés par des dynamiques coopératives.

Les structures ont encore leur légitimité. Si le monde connecté marque un nouveau standard de pluralisme, il est bien connu que l’information qu’on y trouve n’est ni organisée, ni optimisée par l’improvisation d’une main invisible. Il est donc désirable que des institutions se proposent de combiner cet ensemble d’efforts, d’activités et d’objectifs autour de la pensée et de l’écrit. Ainsi établie formellement et stable dans le temps, une telle entité apporte organisation, outils et structure pour mettre en pratique une nouvelle approche du travail d’exploration, d’apprentissage et de créativité littéraires et philosophiques. Pour permettre d’accompagner ce changement de paradigme dans l’enseignement et la culture, l’ICET replace en son cœur le moteur véritable de cette énergie : les acteurs culturels eux-mêmes.

Coopératif

Les temps ont changé : des mass media à internet, le savoir n’a pas arrêté de se démocratiser et de transformer les apprenants et ‘consommateurs’ de contenus en co-acteurs culturels. L’Institut reconnait et célèbre la dissemination de cette richesse, la multiplicité de ces sensibilités individuelles, et propose un lieu pour mettre en commun les vastes domaines intellectuels, littéraires et artistiques profondément investis par des millions de personnes à travers la société civile. A l’ICET, tout individu peut proposer et animer un programme d’étude de textes. 

Cette petite révolution n’est pas un virage radical, un dos tourné aux mondes socioprofessionnels autoritaires au sujet des questions culturelles. Si les membres de la société civile y sont invités à proposer, développer et animer leurs programmes, l’ICET travaille aussi de près avec des chercheurs et enseignants universitaires, avec des journalistes, critiques et éditeurs littéraires, ainsi qu’avec des associations culturelles et intellectuelles de tous bords. Mais tout particulièrement, l’ICET espère mettre en avant les artistes et écrivains contemporains, nous invitant à travers leur regard créatif à revisiter les plus grands auteurs de nos cultures. Ainsi, lecture et écriture se rejoignent : apparait derrière le travail de création toujours un profond engagement avec les patrimoines littéraires et philosophiques, et à son tour l’étude met en ligne de mire, et pour tout apprenant, une invitation à la contribution créative. En se concentrant sur des programmes en petits groupes, l’Institut permet la rencontre de toutes ces sensibilités, pour un processus d’exploration et d’apprentissage dynamique et interactif, et qui reste concentré sur le texte étudié.

Chaque proposition de nouvelle Étude est développée en collaboration entre l’initiateur et le comité de l’Institut. Ce processus permet de traduire une intention générale de projet d’étude dans un programme limité dans le temps, où chaque session de travail s’organise autour de matériaux textuels précisément sélectionnés. Ainsi, l’Institut garantit rigueur et substance, mais aussi le développement d’une voix propre et originale à l’exercice interprétatif et pédagogique de chaque animateur.

Enfin, l’approche coopérative de l’Institut se déploie littéralement sans limite ni frontière. Développé initialement à Delhi en 2017, l’Institut a une vocation internationale, dans un effort de rassembler en un lieu une multiplicité de voix de la culture littéraire et philosophique à travers le monde. L’ICET est la structure centrale et l’interface française pour le public et les participants francophones, en France et à travers le monde, et l’IST (Institute for the Study of Texts) est son pendant anglophone. Nombre des Etudes et programmes de l’Institut sont déjà proposés dans ces deux langues, et, sur la base d’initiatives individuelles, l’Institut sera ouvert à la proposition de programmes dans d’autres langues. Chaque programme se déroule physiquement à l’espace de l’Institut sur Paris, mais accepte aussi un quota de participants pouvant le rejoindre via vidéoconférence. L’Institut considérera les propositions d’Etudes d’individus non localisés sur Paris ; leurs programmes seront entièrement animés par vidéoconférence, avec le groupe principal, présent physiquement à l’Institut, et les participants connectés par vidéoconférence.

pour l’Étude

L’ICET est une organisation culturelle, célébrant et explorant nos héritages philosophiques et littéraires autour de programmes publics et ouverts à tous. Mais le vieil apriori du spectateur passif est bien derrière nous : les participants des programmes de l’Institut sont à la fois les destinataires et les acteurs des cours proposés. En effet, l’Institut met l’accent sur le travail, subtil et de longue haleine, à la racine de toute sensibilité artistique et littéraire : l’étude. L’ICET est un espace d’étude et pour l’étude. Quand culture et pensée deviennent des enjeux vitaux, l’étude n’est pas une phase de vie limitée aux années scolaires, ou aux explorations de l’éducation supérieure, pour ceux qui ont la chance de les entreprendre.

L’étude est une approche plus fondamentale. Attitude à l’égard de soi et du monde, elle est un projet individuel à développer et cultiver à longueur de vie. Dès qu’une telle échelle de patience, d’humilité et de curiosité est établie, l’individu peut doucement voir émerger les réponses pertinentes et originales, nécessaires pour améliorer ses conditions personnelles et contribuer à la société qui l’entoure.

Un système complet et créant des boucles de savoir, l’Institut propose l’occasion d’une telle contribution : l’apprenant peut à son tour proposer une nouvelle Étude. A travers l’approche coopérative, un processus doublement bénéfique se développe : découverte, rencontre et travail pour les participants ; préparation, pédagogie et échanges pour les animateurs.

Des Textes

Définir notre activité comme l’étude des Textes, c’est retrouver en un seul et même lieu des domaines d’expression et de sensibilité distingués pendant très longtemps. La philosophie et la littérature, en particulier, sont enfin invités au dialogue, ouvertement et avec le temps et la flexibilité qu’elles requièrent. Les Études de l’ICET encouragent la formulation d’approches et d’angles pédagogiques combinant auteurs et thèmes au-delà de cette frontière passée. En mettant l’accent sur le matériau textuel, les délimitations classiques des disciplines s’effacent petit à petit, et l’étendue de travail peut s’agrandir, vers ce que le monde anglo-saxon appelle les Humanities. Et pas seulement : l’Institut invite et accueille aussi l’interprétation littéraire de textes appartenant aux sciences sociales ; seront aussi explorées des directions inter-textuelles plus originales, telles que vers les domaines religieux/spirituels et légaux.

Etudier les textes, c’est considérer les textes comme notre matériau primaire. Chaque programme est donc conçu pour amener le texte étudié comme objet principal et initial du travail, par l’approche de l’analyse textuelle. C’est autant la dimension intellectuelle-conceptuelle que créative qui sont explorées dans ces études rapprochées du travail des mots. Ainsi, il devient possible de passer outre l’apriori idéaliste classique, en particulier dans l’enseignement de la philosophie, que le texte est fondamentalement le medium d’un ‘contenu’, d’une ‘signification, des ‘idées’, et seulement secondairement, à l’occasion, un matériau textuel à part entière digne d’intérêt. Cette ‘réduction au sens’ renforce le fossé entre l’interprétant autorisé et les apprenants silencieux, ses grilles d’analyses étant d’autant plus opaques que le texte original est gardé trop à distance. A l’ICET, le texte est toujours au centre du processus d’apprentissage et d’exploration, un centre où se retrouvent animateur et participants pour développer et partager leurs sensibilités de lecteurs.