Ecrire une Autobiographie Spirituelle : Augustin, Les Confessions

Comme le voudrait l’adage, le monde occidental est baigné dans l’ombre de deux montagnes : Platon et Aristote. Mais les montagnes vivent, elles grandissent et se délabrent, et de nouveaux sommets se rapprochent de leur altitude. Augustin est l’un de ceux-là, un pic émergeant de la rencontre de deux plaques tectoniques. Comme les Grecs, il inspecte chaque recoin, le moindre détail de son être. Avec Augustin, au quatrième siècle de notre ère, la philosophie est déjà existentielle : elle ne prend aucun élément de la vie pour acquis, et le sujet humain se doit de faire face à ses plus grands défis. Et comme chez les premiers Chrétiens, cette quête est adressée à un seul interlocuteur, un apex : Dieu. Là aussi, des siècles avant la littérature moderne, la voix d’Augustin est hautement réflexive et méta. Dans Les Confessions, mémoire à la voix hésitante, Augustin prie Dieu de lui apprendre à prier, l’implorant de révéler Sa présence divine à son esprit sceptique. Pureté de l’intention : Augustin, le penseur de la volonté, chante les éloges de ce pouvoir interne, cette solide orientation du cœur et de l’esprit, qui commence à changer la réalité avant même d’entrer dans le monde extérieur.

Les Confessions racontent, à la première personne, l’histoire de sa vie, avec l’accessibilité d’un journal et la profondeur d’une prière. Il médite sur l’éducation, la politique, l’amitié, la religion, la sexualité, l’ambition, la curiosité et la distraction, ainsi que sur beaucoup d’autres thèmes, à travers une sélection de scènes tirées de son expérience, depuis l’enfance jusqu’à sa conversion au Christianisme à 31 ans. Augustin revisite sa vie – et il pense l’exercice-même, explore ce que l’écriture permet, et cherche comment vivre au mieux avec son passé, entre les deux extrêmes de la honte et de la nostalgie. Cette longue histoire inclut aussi celle de sa trajectoire au cœur de l’Eglise Chrétienne, ainsi que le grand tournant que provoqua la mort de sa mère, Monica. Le livre se referme sur un commentaire, somptueux et créatif, des premières sections de la Genèse, autour des thèmes de la mémoire et du temps.

Une lecture rapprochée révèle que Les Confessions forment, à la fois, l’une des premières autobiographies dans un style littéraire, l’élaboration de réponses philosophiques à Platon et Plotin (Néo-Platonisme), et le récit d’un périple vers Dieu. Augustin est donc aujourd’hui, et toujours, une source d’inspiration majeure à revisiter, pour nos quêtes contemporaines, qu’elles soient intellectuelles, littéraires ou existentielles.